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L'eucharistie

Origine de l’eucharistie

Le mot «eucharistie» signifie littéralement «bonne grâce». Il se traduit communément par «action de grâce», «rendre grâce». Ce mot «eucharistie» est employé chez Paul et Luc pour décrire le dernier repas, avant la mort de Jésus :

1 Co 11,23 La nuit même où il fut livré, le Seigneur Jésus ayant pris du pain, après avoir rendu grâce
Lc 22,14-16 Jésus prit la coupe, il rendit grâce (…) Puis il prit le pain, après avoir rendu grâce

La fraction du pain (cf. Lc 24:30 ; Lc 24:35 ; Ac 2:42 ; Ac 20:7 ; Ac 20:11), appelée encore le repas du Seigneur (1 Co 11:20 ; Ap 3:20), est devenue l'eucharistie (action de grâce).

Signification de l'eucharistie

Le sacrement de l’eucharistie constitue le sommet de l’expérience chrétienne, celle où Dieu « visite » l’homme sous les espèces du pain et du vin.

Il comporte une triple dimension : rassemblement, mémorial, sacrifice.

Rassemblement

Cette notion recouvre 3 dimensions :

· Assemblée : Le mot grec ekklésia signifie « assemblée ». En effet les chrétiens se rassemblent pour célébrer l’eucharistie. C’est le signe visible de notre identité communautaire. Nous formons tous un même corps au sein de cette Eglise avec des talents différents (cf. l’image de Paul sur le corps : nous formons tous un seul corps avec des membres différents…).

· Convocation : Le mot ekklésia signifie ensuite assemblée « convoquée ». Le Christ nous invite à un repas. Le dimanche (dominica dies = jour du Seigneur qui remplace le sol-dies) est le jour privilégié de ce rassemblement. Il ne ressemble donc pas aux autres (cf. le rite). C’est le premier jour de la semaine parce que c’est le jour de la découverte de la résurrection.

Lc 24, 1 Le premier jour de la semaine, de grand matin, elles vinrent à la tombe en portant les aromates qu'elles avaient préparés. 2 Elles trouvèrent la pierre roulée de devant le tombeau. 3 Etant entrées, elles ne trouvèrent pas le corps du Seigneur Jésus.

· Partage : Ce rassemblement est l’occasion d’un partage de la parole de Dieu et surtout de l’eucharistie. Nous sommes invités au repas pascal (le repas est dans la vie quotidienne un lieu de rencontre, de partage, de dialogue).

Le pain et le vin sont deux symboles tirée de la vie quotidienne ; fruit de la terre et du travail des hommes. Par les paroles de consécration, ils deviennent le corps et le sang du Christ. Dans la culture juive, le corps représente toute la personne ; le sang représente la vie (perdre son sang, c’est perdre sa vie)

Mt 26, 26-28 Pendant qu'ils mangeaient, Jésus prit du pain; et, après avoir rendu grâces, il le rompit, et le donna aux disciples, en disant: Prenez, mangez, ceci est mon corps. Il prit ensuite une coupe; et, après avoir rendu grâces, il la leur donna, en disant: Buvez-en tous; car ceci est mon sang, le sang de l'alliance, qui est répandu pour plusieurs, pour la rémission des péchés.
Jn 6,54 Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang a la vie éternelle; et je le ressusciterai au dernier jour.

Mémorial

1Co 11, 24-26 : faites cela, … , en mémoire de moi. Car toutes les fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous annoncez la mort du Seigneur, jusqu'à ce qu'il vienne.

La messe fait mémoire de la cène du jeudi saint lors de laquelle Jésus mangea la Pâque juive avec ses disciples. Elle annonce aussi la venue du Seigneur. La Pâque juive était d’abord la fête des semailles et des premiers agneaux ; puis elle est devenue la fête de la libération de l’esclavage en Egypte. Son nom hébreu pesha évoque un passage : passage de l’esclavage à la liberté, passage de la mort à la vie.

Le mémorial comporte 3 dimensions : le souvenir, l’accueil et l’annonce (prendre l’exemple du mémorial de la paix à Caen qui a pour mission de ne pas oublier le passé et de l’annoncer aux générations à venir).

· Souvenir : Le souvenir est l’actualisation d’un événement passé et non pas un retour au passé (j’en frémis encore, j’en rigole encore …). Se souvenir de quelqu’un, c’est reprendre une relation vivante avec lui. En nous souvenant de la cène du Christ, nous la revivons ; nous commémorons sa Pâque.

· Accueil : La célébration eucharistique est lieu d’accueil, au cœur de ma vie, de cette présence mystérieuse du Christ ressuscité. Elle creuse en moi la place où l’action de Dieu peut me rejoindre et me combler. Elle me transforme pour que je puisse transformer le monde.

· Annonce : L’annonce est un dévoilement, une révélation, une manifestation (annonce de la naissance d’un enfant). L’eucharistie proclame la venue du Christ dans l’aujourd’hui de notre existence et nous invite à notre tour d’être les témoins de la bonne nouvelle (évangile).

Sacrifice

Faire un sacrifice, c’est dans le langage courant « se priver de quelque chose pour un plus grand bien » (cf. les renoncements de Jésus dans le récit de la tentation au désert) ; dans le langage religieux, il désigne « une offrande faite à la divinité selon un rituel ». Etymologiquement, le mot signifie « faire du sacré » ; c’est donc un agir humain qui instaure une relation avec le divin.

L’acte du sacrifice s’accomplit en 3 temps (Cf. A. Vergote, Eucharistie, symbole et réalité) : l’offrande, le passage et la communion.

· L’offrande : L’offrande est avant tout la reconnaissance de l’autre. Le don ou le cadeau n’est que le signe visible de cette reconnaissance ; sa valeur marchande importe peu (ex. de la rose). L’offrande est une manière de dire que l’autre existe pour moi. Elle creuse en nous la place pour que la présence de l’autre soit reconnue, pour que la présence divine advienne. Faire une offrande à Dieu, c’est affirmer qu’il est à l’origine de l’alliance et l’inviter à notre table.

· Le passage : L’offrande ne s’accomplit que par un passage à l’autre, c’est à dire une mort symbolique de soi-même. Cela signifie que l’homme doit renoncer à l’immédiat, au tout tout de suite, à son goût de possession pour reconnaître l’autre. Il doit renoncer à être dieu pour recevoir la divinité. Cette mort de soi-même conduit à la joie de la résurrection.

· La communion : Le don de soi instaure une communion. Un lien nouveau se créé. Il s’agit d’un échange de vie qui m’enrichit de la personne même à qui j’ai offert. En me donnant à Dieu dans un mouvement de sacrifice, c’est Dieu que je reçois. En offrant un cadeau, c’est la joie et la reconnaissance de l’autre que je reçois. En définitive, c’est mon être et non pas mon avoir qui s’enrichit. En communiant au corps et au sang du Christ, je grandis dans l’amour de Dieu.

Histoire de la messe

Du 1er au 4e siècle

Durant les 4 premiers siècles, l’eucharistie est célébrée à la maison. « Ils rompaient le pain à domicile », dit Luc de la première communauté chrétienne (Ac 2, 46). Le repas eucharistique se passe d’abord dans le cadre des repas habituels. Puis (St Paul y fait allusion en 1 Co 11) le culte eucharistique se différencie de ces repas habituels pour éviter sans doute à la fois les abus (voire les ivresses) et les inégalités, et aussi pour donner au repas eucharistique son caractère unique.

Le christianisme se répand dans tout le bassin méditerranéen. C’est la période des martyrs, celle de la mise en place de la vie de l’Eglise avec ses épiscopes, ses presbytres, ses diacres.

Seul l’évêque préside l’Eucharistie. Les baptisés y participent Les catéchumènes sont introduits progressivement à ce Mystère : ils ne participent qu’à la liturgie de la Parole, de même que les pénitents. Dès ces premiers temps on trouve l’essentiel du déroulement de la messe : le rassemblement, la proclamation de la Parole et son explication, une grande prière universelle, où beaucoup peuvent intervenir, le baiser de paix à ce moment là, puis l’apport du pain et du vin, ensuite la prière d’action de grâce, dans laquelle se situe le récit de l’institution de l’Eucharistie.

C’est le président de la célébration qui dit la prière d’action de grâce : elle est de sa libre inspiration, dans la tradition juive de la prière synagogale, et avec bien sûr l’événement central où l’on fait mémoire de la vie, de la mort et de la résurrection de Jésus Christ. L’assemblée répond à la fin par un "amen". Les diacres assurent le service de la communion. Cette communion sera portée aux absents dès la fin du rassemblement. Il n’ y a pas de réserve eucharistique.

Du 4e au 8e siècle

A partir de la fin du IVème siècle, le diacre clame à la fin de la célébration : « Ite missa est » c'est-à-dire « Allez, c’est la messe est (dite).» Le mot "messe" est tiré de cette envoi en mission.

La célébration se partage en deux parties. La première, appelée la liturgie de la Parole ou liturgie des catéchumènes (ceux qui se préparent au baptême), est composée de lectures bibliques (choisies en fonction du sermon), d’instructions et de prières. La deuxième partie, dont sont exclus les non-baptisés et les pénitents, comprend l'offertoire et l’action de grâces qui consacre le pain et le vin. Le pain consacré est du pain ordinaire, parfois apporté de la maison. Si l’évêque est de droit le prédicateur de la liturgie, les prêtres peuvent prendre la parole, voire présider.

Eglises et basiliques se construisent. C’est à cette période que les vêtements liturgiques se généralisent, empruntés aux habitudes impériales. L’évêque de Rome acquiert une autorité importante, sans primauté absolue sur toutes les Eglises. La partie pénitentielle de la liturgie se développe, introduisant notamment le kyrie chez les grecs. Le latin, adopté à Rome vers le 3e siècle, est utilisé par l’Eglise d’Occident de façon plus générale. Le chant grégorien fait son apparition au VIIIème siècle ce qui a pour effet d’écarter le peuple de la participation à la messe.

Au moyen-âge

A partir du VIIIème siècle, on n’emploie plus de pain fermenté pour la communion, mais des hosties blanches et rondes en pain azyme, tandis que le vin consacré (vin rouge) n’est distribué aux fidèles qu’à de très rares occasions. Il n’y a plus de fraction du pain et les offrandes faites par l’assemblée se réduisent à quelques pièces de monnaie. La communion est reçue dans la bouche, et non plus dans les mains, par les fidèles désormais agenouillés au banc de communion.

Les fidèles deviennent passifs et eassistent à la messe à la messe comme à un spectacle, dans l’attente de la descente de Dieu sur l’autel. Aussi les fidèles, désireux de contempler ce qui était caché dans le sacrement, firent-ils pression sur les clercs pour qu’ils leur montrent l’hostie au moment précis où s’accomplissait le mystère divin. Telle est l’origine du rite de l’élévation de l’hostie pendant la messe !

Vers le XIIIème siècle, la construction de cathédrales éloigne encore un peu plus le peuple de la célébration. Il y a une coupure entre le prêtre et l’assemblée et cela d’autant plus que les messes seront récitées à voix basse par le célébrant.

Du Concile de Trente au 20e sièclee

Au XVIème siècle, les fidèles récitent le chapelet pendant que le prêtre célèbre. C’est par le chant que le peuple participait à la « messe chantée », alors que pour la « messe basse » seul le choriste répondait au prêtre.

La Réforme protestante pousse l’Eglise catholique à réaffirmer sa théologie du sacrifice eucharistique.

Au XVIIème siècle : traduction des missels en langue populaire

1905 : restauration de la communion fréquente. Le pape Pie X en 1905 décrète que la communion peut se faire dès l’âge de raison (7 ans). Début de la création des cantiques populaires.

Vatican II : Restauration des liturgies en langues locales, reprise de la concélébration face à l’assemblée, valorisation de la liturgie de la Parole avec notamment l’instauration d’un cycle triennal de lectures bibliques, nouvelles prières eucharistiques.